Le nouveau numéro de la revue d’anthropologie et d’histoire des arts du musée du quai Branly – Jacques Chirac est consacré aux « Recherches artistiques sur les restes humains« , coordonné par Frédéric Keck et Lucia Piccioni.
Les restes humains collectés dans un contexte colonial et conservés dans les collections des musées d’anthropologie sont aujourd’hui l’objet de discussions sur leur possible restitution.
Ces débats sont pris dans une double temporalité, entre l’urgence du processus diplomatique de reconnaissance de la dette coloniale et la lenteur du processus juridique d’établissement de leur provenance et de leur propriété. Dans ce temps suspendu, les artistes se sont intéressés à la question et mènent des recherches qui, sans aboutir à une connaissance objective de la provenance, travaillent sur les failles, les manques, les ambivalences, en interrogeant ce qui peut ou non être montré de ces collections sensibles.
Entre le 17e et le 19e siècle, les artistes jouent un rôle de premier plan dans la représentation et la diffusion des restes humains dans les ouvrages scientifiques et dans les musées. Ils produisent des dessins, des daguerréotypes, des photographies, des gravures de crânes mais aussi des moulages corporels.
Les artistes, qui au 20e siècle, ont surtout vu le pouvoir transgressif des restes humains, se concentrent aujourd’hui sur l’identité de l’individu derrière les crânes, ou sur une transfiguration poétique de ces ossements par l’image photographique.
En partant de ces recherches artistiques dans des collections de musées européens prises dans la dynamique extractiviste du processus de colonisation, ce dossier décrit une nouvelle relation entre art et science dans la mise en valeur de collections situées entre la vie et la mort.